Old tears of sadness, mixed with new tears of happiness.
Calme toi April. Me dis-je à moi-même. Je deviens folle. J'étais moins tarée en Prison. L'air de Bristol ne me fait pas vraiment du bien. J'ai reposé mon téléphone sur mon lit avant de partir, c'est pas malin, comment vais-je la retrouver maintenant ? La station de train n'est pas si grande mais je flippe sévèrement. Je vais la revoir. J'sais pas si c'est bon pour moi réellement. Mais, je vais la revoir. Mon coeur bat tellement vite, je vais mourir. J'ai enfilé un vieux tee-shirt trop long par dessus mon collant plein de trous, j'ai ressorti mon vieux perfecto à clous, le seul vêtement qui ait un peu de valeur dans ma garde robe. Mes grosses Dc Martens traînent lourdement sur le béton du quai, je fais les cent pas. J'ai même pas prit le temps de corriger mon maquillage. J'ai du noir plein les yeux. Mes cheveux sont pleins de noeuds. Ce genre de détails que j'aurais voulu effacer pour qu'elle me regarde avec des yeux qui brillent. Je la hais tellement de me rendre comme ça. Je stresse comme une folle. J'enchaîne les cigarettes. Je prends même pas la peine de les finir avant d'en rallumer une autre. J'ai froid, j'ai faim. Mais la seule chose dont j'ai besoin, c'est elle. J'me souviendrais toujours de notre premier échange de regards. Je le regrette tellement. Pourquoi j'ai pas fermé les yeux, pourquoi ne suis-je pas aveugle ? Elle me tue. Elle va venir. Je l'espère. Mais pas tellement en réalité. Est-ce qu'elle va vraiment venir ?
J’ai prévenu Evya que je sortais. Elle n’a pas bronché, elle n’a pas posé de questions non plus, c’est ce que j’apprécie chez elle. J’ai la gorge nouée, la nervosité ne me quitte plus depuis que j’ai réentendu sa voix. Mon estomac semble faire une avalanche de montagne russes et j’ai l’impression que je vais finir par rendre le sandwich qu’on a réussi a piqué à un couple un peu trop occuper à se rouler des pelles. J’ai pas de manteau, alors je sors avec mon pull un peu fatigué qui manque de péter de partout. Je maudis intérieurement mon patron de me sous payer, mais aussi moi pour utiliser le peu d’argent que je possède d’une mauvaise façon. Je soupire, je suis sans doute la seule responsable.
Le froid me mord rapidement, mais j’ai l’habitude. Je serre les dents, avançant en me tenant les bras, ma tension montant à chaque pas me rapprochant de notre point de rendez vous. Je suis contente de la retrouver, et en même temps j’ai peur de sa réaction face à l’évident abandon que je lui ai fait vivre. April était une des têtes les plus craintes en prison et c’était non sans raison. Mais elle ne me ferait pas de mal, n’est ce pas ? J’admet ne pas être sûre à 100 %. Je finis par soupirer alors que j’entre dans la gare, cherchant ses cheveux blonds, ignorant mes maux de ventre, m’avançant vers ce que je pense être elle. J’ai sans doute la voix un peu étranglée quand j’arrive à sa hauteur pour lâcher un petit : « Salut.. »
Old tears of sadness, mixed with new tears of happiness.
Salut.. J'aurais reconnu sa voix d'entre mille. Mon coeur a loupé un tour. Les pensées stupides se bousculent dans ma tête. Putain de merde. J'ai sûrement l'air idiote. Je me retourne doucement vers elle. Mon dieu, elle est encore plus belle que dans mon souvenir. Elle me fait péter les plombs. Elle dégage un truc de fou, j'ai juste envie de la prendre dans mes bras. De l'embrasser. Putain, sentir ses lèvres contre les miennes. Ca serait dingue. Si elle savait tout ce qui me passait par la tête à ce moment là, elle partirait en courant ma jolie rousse. J'essaye de me calmer, je ferme les yeux quelques secondes et prends une grande respiration.
Je ne sais pas quoi lui dire, quoi faire. J'ai envie de la gifler pour ce qu'elle m'a fait. J'ai envie de l'embrasser. J'ai envie de ... Bon calme toi April. Je la regarde à nouveau, qu'elle est belle .. J'ai arrêté de réfléchir quelques instants et me voici collée à elle. J'ai passé mes bras autour de sa taille et posé ma tête sur son épaule. Je ferme mes yeux et respire juste son odeur. Satanée Kate. Je te hais tellement si tu savais.
Je reste plantée devant elle, assez anxieuse de ces retrouvailles. J’ai le cœur qui tambourine contre ma poitrine, j’essaye d’anticiper la claque ou la droite que je risque de me prendre, et que je n’aurai pas volé. Pourtant rien n’arrive, je la vois fermer les yeux, j’imagine qu’elle prend sur elle. Rien ne vient, et au contraire, je ferme les yeux quand elle s’approche de moi, prête à encaisser, alors que ses bras se glissent autour de ma taille et sa tête sur mon épaule. Je soupire en soulagement, répondant avec douceur à son étreinte, passant mes mains dans son cou. « C’est bon de te revoir. » lâchais-je finalement en murmurant à son oreille. J’étais sincère, on avait quand même partagé un certain temps une cellule ensemble, et si la cohabitation n’avait pas été évidente au début, à partir du moment où April s’était calmée envers moi, c’était devenu vraiment plus agréable, enfin, autant qu’un séjour en prison peut l’être.
Je me recule finalement un peu pour la regarder, souriant légèrement. « Ecoute, avant que tu me tombes dessus, je suis désolée. Je le suis vraiment… »
Old tears of sadness, mixed with new tears of happiness.
Ecoute, avant que tu me tombes dessus, je suis désolée. Je le suis vraiment… Elle était sûrement très sincère, mais je lui en voulait. Elle m'avait abandonnée. Elle m'avait laissée seule dans cet enfer que je n'avais qu'à moitié mérité. Elle aurait du rester putain. Rester avec moi. Je suis égoïste mais elle aurait tellement du. Kate, tu m'as rendue folle. Je t'ai enfin retrouvé et je te laisserais plus filer. Je sais pas ce que tu m'as fait, mais j'suis accro.
Son sourire .. Il m'avait manqué. Il est magique. Je me retiens tellement de pas l'embrasser. J'en meurs d'envie. Kate pourquoi je suis dingue de toi ? Je la regarde dans les yeux, j'esquisse un très léger sourire. Je comprends, Kate ... Je comprends. Non, j'comprenais pas vraiment. Mais j'voulais pas que son sourire disparaisse, alors j'ai simplement dit ça. Tu .. Deviens quoi ? J'étais vraiment curieuse de savoir. Ma jolie rousse et son sourire, que devenait-ils ?
Revoir April était sans doute la meilleure chose qui m’était arrivée depuis un moment. Entre le départ de Gill, et le suicide de Jack, mon meilleur ami qui m’avait hébergé durant un an, je m’étais retrouvée endeuillée et à la porte, à nouveau seule dans le froid. Je m’étais toujours demandé à quoi ressemblait la blonde en dehors de la prison, je veux dire, sans nos affreuses tenues de détenues. Ce n’était pas decevant, au contraire. Je perds un instant mon regard dans le bleu de ses yeux entourés de maquillage, ses prunelles ressortent encore plus comme ça, elle est sublime, son style aussi, assez rock, ça me plait beaucoup.
Elle garde son calme et je soupire de soulagement. « Tu .. Deviens quoi ? » Je me pince la lèvre inférieur, évitant soigneusement de croiser son regard un moment, commençant à marcher, lui faisant signe de me suivre pour qu’elle ne pense pas que je fuis. « Je travaille comme serveuse et chanteuse dans un bar qui m’exploite avec un patron qui est un porc et un salaud. » Je suis SDF ? Non pas la peine de lui en parler, vraiment pas. « Et toi alors ? T’as réussi à trouver quelque chose à ta sortie ? Je peux te filer quelques adresses si tu as besoin.» Je lui souris doucement.
Old tears of sadness, mixed with new tears of happiness.
Je la suivais rapidement. J'voulais pas qu'elle s'enfuit. Peut-être ne voulait-elle pas vraiment me voir. Mais après tout, elle a accepté tout de suite pour qu'on se voit. Ca me fait du bien, j'ai pas d'amis par ici, j'ai personne. La solitude à toujours été ma vie mais je n'arrivais plus bien à m'en contenter et j'avais de plus en plus besoin de quelqu'un. Mais pas n'importe qui, je voulais elle. Je la voulais plus que n'importe qui. Je préférais n'avoir qu'elle plutôt que 10000 amis. C'était sûrement bizarre, aussi je me retenais de lui dire ce genre de chose qui me passait par la tête, elle aurait sûrement fuit. Comme je fuis devant les autres.
Je travaille comme serveuse et chanteuse dans un bar qui m’exploite avec un patron qui est un porc et un salaud. Et bien dans ce cas nous étions deux, J'pensais qu'il existait autant de clubs pourris à Bristol. La sous-paye est monnaie courante par ici. Mais bon, je ne sais rien faire d'autre de toute façon. Elle chante ..? Oh, comme j'aimerais l'écouter. Enfin non, je serais sûrement encore plus accro et je risquerais de devenir sûrement ... violente et impatiente.
Et toi alors ? T’as réussi à trouver quelque chose à ta sortie ? Je peux te filer quelques adresses si tu as besoin. Mon dieu elle sourit à nouveau, je meurs. Comment ça se fait que je craque autant ... Je suis malade. Je baisse mon regard sur mes chaussures, je vais me contenter de regarder le goudron. Je suis ... Serveuse, comme toi. Et ... C'est tout.Serveuse et seulement ça. Je veux pas qu'elle se fasse des idées. Strip teaseuse, c'est dégradant, surtout dans mon club. Elle pourrait penser que je vends mon corps ... Ça serait horrible. Je ne pourrais jamais confier mon corps à quelqu'un d'autre qu'à elle. Dis ... Tu vis où toi ? Elle va sûrement penser que je veux la suivre chez elle ou je ne sais quoi .. Je suis vraiment stupide. Et si elle me demande où moi je vis ...? J'ai tellement honte. Je ne pourrais même pas lui montrer mon chez-moi, c'est si minable, miteux, ça sent le moisi. Y a des fuites d'eau au plafond et ... Oh mon dieu. Je regrette déjà ma question.
C’est tellement étrange de voir April en dehors de la prison, mais c’est plutôt agréable. Je n’ai plus la peur au ventre que l’on vienne nous agresser à chaque seconde, même si là bas, la blonde avait plutôt la paix, ça n’avait jamais été mon cas. A croire que j’avais la tête de la parfaite victime, c’est vrai que j’avais laissé les autres me marcher dessus. Au moins, ça m’avait forgé le caractère, si l’on peut dire. La nervosité de nos retrouvailles s’est vite envolée puisqu’elle n’a montré aucune hostilité à mon encontre et je me détendais un peu plus à chaque seconde, profitant simplement de sa présence à mes côtés. Je me suis toujours sentie en sécurité avec elle, aussi étrange cela puisse être, même quand elle me menaçait. Je n’ai jamais su expliquer pourquoi, peut être était-ce sa façon d’être, sa posture, quelque chose en elle montrait qu’elle avait confiance en elle même et faisait d’elle une sorte de leader naturel.
Je lui souris et elle évite mon regard. Je redresse un sourcil, étonnée, me demandant si j’ai dis ou fait quelque chose de mal, qui l’a mis mal à l’aise. Je ne crois pas. Je laisse tomber, ne cherchant pas à comprendre, mettant ça sur le compte de la gêne quand elle me réponds. « Je suis ... Serveuse, comme toi. Et ... C'est tout. » Je souris à nouveau, attrapant son bras. « C’est mieux que rien du tout alors. Quoi que je suis sûre que tu pourrais faire le boulot que tu veux, il te suffirait de faire les yeux doux à n’importe quel patron, je doute qu’ils pourraient te résister.» En fait je pense que personne ne le pourrait. Je lâche son bras à sa question. « Dis ... Tu vis où toi ? » Je la regarde un instant, cherchant ce que je pourrais bien lui répondre, un peu perdue. Je me pince les lèvres en fuyant simplement ses prunelles. Je ne sais pas si je dois lui dire la vérité ou lui mentir, mais je crois que la honte m’accable un peu trop. Je ris jaune, un peu nerveusement. Ma gorge se serre. « J’ai plusieurs adresses. Si on peut dire… » Je passe un main dans mes cheveux. « Enfin, pas dans le sens… légal, tu vois ? » J’espèrais qu’elle comprendrait. Pas question de lui avouer que j’ai passé la grosse partie de l’hiver sous un pont, au bon vivre des habitants un peu clément qui avaient pitiés de moi et m’apportaient quelques couvertures. Non, Evya est rentrée dans ma vie un soir, se réfugiant elle aussi du froid sous le pont où j’étais, et on a commencé ensemble a squatté quelques maisons vidées pour les vacances. « J’espère que t’auras réussi à mieux rebondir que moi sur ce point. Sinon on peut te faire une petite place. » lachais-je en esquissant un sourire, plus honteuse que jamais de ma condition, le visage rouge.
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