T'es rentrée au bercail, il y a quelques jours. Ton voyage humanitaire avait pris fin, où plutôt les tâches de ton contrat avec l'organisme s'était terminé et il ne restait plus qu'à rentrer chez toi. Comme à l'habitude, lorsque t'as quittée le bureau de l'organisateur et que t'as fermée la porte derrière toi, t'as eu cette boule dans le ventre comme à chaque fois lorsque tu t'apprêtes à rentrer à la maison. T'as cette boule et un moment de vertige pourtant tu sais qu'en rentrant tu ne seras pas seule que des gens t'attendent et c'est ce qui te fait peur, non tu n'as pas peur des gens t'es pas un individu antisocial au contraire, ce qui te fait peur c'est la routine qui se rattache à ces gens là. Tu fuis la routine comme la peste, t'aimes pas d'encrer longtemps à un endroit, t'as toujours cette soif d'aventure et ce depuis que t'es gamine, cette soif ne sait jamais rassasiée même qu'elle continue en augmentant. Mais bon, tu te consoles en te disant que lorsque tu les verras cette tempête qui se bouscule en toi se calmera un peu l'espace d'un temps. Du coup, c'est avec cette pensée que t'as pris ton avion et alors que tu regardais à travers le hublot un sourire tendre s'est dessiné sur ton visage. Lorsque t'as touchée terre, t'es rentrée dans ton petit appartement miteux et tu t'es empressée d'ouvrir les volets pour laisser entrer la lumière et t'as défais tes valises pour finir par t'endormir complètement claquée par le décalage horaire et cette environnement que tu n'as pas convoité depuis presque six mois. Le lendemain matin, t'as continué à t'installer tranquillement en reprenant place dans ton domicile, ce domicile que tu comptes quitter de nouveau lorsque l'envie de partir te reprendra aux tripes. Alors que tu termines de t'installer, tes yeux se posent sur un cadre où une photographie est installée, tu plisses les yeux et t'empares de la photo en question. On peut t'apercevoir sourire large et franc en compagnie de deux autres demoiselles qui ont le même bleu profond dans le regard et cela te fait sourire.

Putain, ce qu'elles t'ont manqués tes deux soeurs. C'est grâce à elles que tu te consoles d'être rentré. Tu finis par reposer la photo à sa place et tu regardes un moment autour de toi avec cet air satisfait, puis tu t'empares de ton portable et tu les appelles pour leurs proposer une soirée à la foire, un endroit que tu affectionnes et qui te rappelle une multitude de souvenirs avec elles. Bien entendu, c'est reconnu que vous ne faites pas les choses à moitié dans la famille et c'est pourquoi tu fouilles dans une vieille malle en bois qui trône dans le coin du salon à la recherche de lunettes fumées et d'un tissu des années 60 à mettre sur ta tête. Ouais, c'est à croire que vous ne sortez jamais normalement quelque part, mais en fait c'est ton aînée qui doit se déguiser pour ne pas être reconnue avec vous, ouais à cause d'une affaire familiale où il y a une histoire d'argent en jeu. Voilà, pourquoi tu pars dans les pays étranger, là-bas il n'est pas question d'argent ou du moins c'est beaucoup moins omniprésent et cela ne déchire pas une famille comme la tienne à pu l'être. M'enfin, tu te dis qu'embarquer dans le jeu d'être déguisée pouvait être amusant et personnellement, tu te fous d'avoir l'air stupide tout ce que tu souhaites c'est les revoir. Lors de votre discussion téléphonique vous vous, êtes donnez rendez-vous devant la machine de barbe à papa comme point de repère et c'est donc là que tu finis par arriver vêtue d'un ensemble des années 60, ouais tu fais jamais les choses à moitié et tu t'es dis que l'entièreté du déguisement serait mieux. Alors, t'es là devant le stand à barbe à papa à regarder un peu partout guettant leurs arrivé avec cette boule dans le ventre, mais cette fois la boule que tu as n'es pas mauvaise puisque t'es chez toi.

La seule excuse que t'as trouvé pour partir de ton bureau, c'est que tu te sentais pas bien. Après avoir manger une tonne de barbe papas peut-être, mais là c'est pas le cas. Tu te dépêches de rentrer. Tes talons claquent sur le parquet et tu les balances avec plaisir dans le fond de ta chambre. Tu fouilles dans le fond de ton placard. T'as rien des années 60, merde. Tu traverses le couloir pour fouiller dans la chambre de Max. Faut absolument que tu trouves un truc. T'as pas le choix. Ton père -avec tout le respect que tu lui dois- est tout simplement un gros con qui aurait jamais du t’interdire de voir Louve. Tu noues un bandeau bleu marine sur ta tête. Un chignon flou pour faire tenir tes boucles. T'attrapes une paire de rayban, un modèle aviator avec les verres rosés que tu glisses sur ton nez. « Louve bouge toi le cul. On va être en retard. » T'as largement le temps de colorer tes lèvres de rouge mat et de ranger ton rouge à lèvres alors que t'entends Louve dévaler les escaliers. T'enfiles les docs de Max qui traînent et qu'elle a oublié de ranger. Tu plonges dans les yeux de ta sœur si semblable aux tiens et tu arranges une ou deux mèches de cheveux. « Joli. » Tu l'attrapes par la main et l’entraîne avec toi vers la station de métro la plus proche. Tes voitures ne sont pas assez discrètes pour traverser la ville incognito. Alors tu dévales les escaliers à toute vitesse, presser de sortir de sous-terrains. Une station. Encore une. Une dernière et vous êtes arrivées. Tu te laisses porter par la foule pour remonter et retrouver la lumière.
Tu la vois de loin Max. En pleine lumière, ses mèches prennent feu. Un vrai feu d'artifice. Il y en a dans ton ventre aussi de feu d'artifice. Un léger sourire orne tes lèvres. T'es contente de la retrouver Max. Tu le montres pas c'est tout. L'expression des sentiments c'est quelque chose qui manque dans ton éducation. « T'as sorti le grand jeu à ce que je vois. » Tu les laisses s'enlacer, gardant tes mains dans tes poches. Etre l'étrangère de la famille ça te va. Celle qu'on évite, qu'on fuit. T'es anxieuse, tu regardes lentement autour de toi. Tu devrais pas l'être. Sortir, passer du temps avec tes sœurs, rien de plus normal. Sauf quand une parcoure le monde, surement à la recherche de sa liberté ou d'un nouveau monde, et que l'autre s'est fait rejeté par ton père, en jouant les anarchistes au cœur d'or.

Tu ranges une à une tes mèches rousses dans le foulard que tu as noué autour de ta tête en mode année soixante. À croire que les rouquines ont des idées bizarres quand elles se réunissent entre elles. T'as joué le jeu à fond avec ton énorme collier de fausses perles à la Audrey Hepburn, tes lunettes de soleil rondes et la veste en jean de Nash, trois fois trop grande pour toi. Tu fourres tout dans ses immenses poches, celle de ton shirt étant définitivement trop étroites pour tout ces trucs de filles -téléphone, miroir, porte-monnaie, mouchoir, clé, baume à lèvre- heureusement que tu n'avais pas à t'encombrer d'un paquet de cigarettes et d'un briquet en plus de tout ça. Non, tu fumais pas, toi. Pas comme une certaine personne qui.. Louve, c'est pas le moment de penser à ça. En plus, il y a Dylan qui te crie après pour que tu t'actives un peu. « Mais non, on sera pas en retard ! » Tu sautes dans ta paire de bottines et tu la rejoins en galopant, toute fière de toi. Vos tenues sont très réussies, et autant dire que pour des demoiselles qui veulent rester incognito, vous ne risquez pas de passer inaperçues.  

Vous engouffrez dans le métro et tu regardes les gens à travers tes lunettes, souriant. T'as l'impression que c'est mardi gras et que t'as à nouveau dix ans, parce que Dylan te tenait encore la main il y a peine trente secondes. Tu penses à autre chose, enfin. Même si les gens lui ressemblent tous et que tu le vois partout. Bientôt, vous arrivez à cette fameuse fête foraine. Ça sent le sucre, ça sent les gaufres et les crêpes. Tu sautilles de joie comme une gamine et la silhouette de Max se dessine au loin. Comme le veut votre petit rituel, vous vous sautez dans les bras, vous couvrant mutuellement de baisers pendant que l'aînée reste en retrait de cet amour sororal, comme d'habitude. « On aura jamais vu autant de rousses sexys au mètre carré ! » déclares-tu en pouffant de rire. Tu regardes les stands autour de toi. Pêche aux canards, tir au fusil, attraction à sensations. Tu ne tiens plus en place, joignant tes mains. « On commence par quoi ? »

Alors que t'es là, à attendre patiemment à regarder autour et parfois te mettre sur la pointe des pieds pour tenter de voir ces deux visages familliers. Tu sais pas trop pourquoi, t'es si nerveuse en fait? Peut-être que tu te sens coupable d'être autant nomade et de les laisser si souvent derrière toi, mais cette inquiétude s'envole aussitôt que tu les vois au loin, elles sont tellement belles malgré qu'elles soient dans ce costume de manière incognito. T'affiches un large sourire et t'approchant d'elle, et sans hésitation tu viens serrer ta petite soeur contre toi en l'embrassant sur les joues et tu prends le temps de la regarder, t'as l'impression que la maturité s'est posée sur son visage durant ton absence bien qu'elle demeure dans ton coeur, ton bébé lou. Tu finis par de défaire de l'étreinte de celle-ci, lorsque tu entends la voix de ton aînée qui s'adresse à toi, tu lui souris et baisse les yeux sur ton costume c'est vrai, que t'es allée fort sur ce coup là. Dylan, chère Dylan l'aînée du trio, la rousse au coeur de glace? T'as jamais vraiment cru à cette théorie, tu réalises avec les années, qu'elle ne sait juste pas comment faire au niveau de ses émotions, du coup elle demeure à distance les mains dans les poches. « Les Moriathy, ne font jamais rien à moitié.» Dis-tu avec un petit sourire pour répondre à son affirmation et tu reposes tes yeux sur Lou qui semble impatiente de profiter de ce lieu. Tu rigoles avec elle à ses mots, effectivement elle a raison sur ce point. Puis, elle vient à vous demandez par quoi vous allez commencer, tu regardes un moment autour et tu plisses les yeux alors que tu repères la maison hantée, tu te dis que pour un premier truc ça pourrait être sympa avant d'affronter les gros manèges qui donnent la gerbe. Tu souris doucement de nouveau et t'hausses les épaules en disant alors que ton index pointe la maison hantée; « Pourquoi, on commencerait pas par la maison hantée, vous en pensez quoi?» Personnellement, t'es une maniaque de la fête foraine et tout les trucs que l'on peut y retrouver te plaise à mort, alors ça t'importe peu. Tu jetes un regard vers tes deux soeurs et t'ajoutes avec ton regard et sourire malicieux; « À moins que vous ayez les chocottes?» T'arques un sourcil, tu sais que ce genre de provocation fonctionne toujours sur elles.

Tu l'avoueras pas. Mais ça te manque tout ça. Les sorties à trois. Les discussions tard dans la nuit, sous la couette pour qu'on ne voit pas la lumière. Pour que les parents ne les engueulent  pas parce que vous avez école le lendemain. Maintenant. Juste les voir quelques instants. C'est rare finalement. Les souvenirs restent. Commencent à diminuer. Les moments aussi. Et parfois t'aimerais juste leur dire d'aller se faire voir à tes parents. De prendre tes sœurs dans tes bras. De leur dire toute la vérité. Que toute redevienne comme avant. Alors en attendant. Tu regardes autour de toi pendant ses effusions d'amour, comme si ça n'avait pas d'importance. Auxquelles, au fond, t'aimerais participer. Tu reposes tes yeux sur elles. Leurs remarques te font sourire. Sexy ? Vous êtes plus que ça. Mais ce n'est pas ce qui t'importe pour l'instant. Tu veux juste profiter du moment présent. Tu regardes autour de toi. Essayant de dénicher la meilleure attraction. « C'est parfait. » Tu te souviens quand vous faisiez la maison hantée étant petites. Que Louve se blottissait dans tes bras, pendant que tu lui faisais croire que tu n'avais pas peur. Et que Max vous faisait croire qu'elle était invincible. Voyons voir si cela à changer. Tu leurs fais un signe de tête pour qu'elles te suivent . Tu évites les regards en te glissant dans la queue qui n'est pas si longue finalement. « La première qui crie paye une tournée de barbe à papa. » Clin d’œil discret. Vous avancez lentement. « Plutôt deux finalement. » A votre tour. Elles passent devant toi, prennent le premier wagon. Toi le deuxième. Tes raybans sur ta tête. C'est parti.

Vous entrez dans la queue. Comme d'habitude, tu ne sais pas attendre. Deux minutes sans bouger et tu commences déjà à jouer avec les cheveux de Maxime, les tresser, ou plutôt faire des nœuds, accentuer un peu le désordre en te disant qu'au moins elle pensera à toi ce soir, quand sa brosse restera coincée dans sa chevelure. Enfin, vous prenez place dans le petit train fantôme. Ça te faisait peur, gamine, mais t'es grande maintenant. Non ? Il y a pas de raison que tu cries. Ça démarre tout doucement, tu lances des regards derrière, vers Dylan, sautillant presque sur ton siège. T'as ce putain de grand sourire qui illumine ton visage, juste parce que vous êtes toutes les trois réunies. Ça y est, ça commence. Les cris, les aboiements, les bruits de tronçonneuse, de portes qui claquent. Ça en serait presque stressant. Squelette, zombies, vampires. Tu ries plus qu'autre chose, jusqu'au coup de tonnerre et son flash. Tu sursautes, étouffant un cri de stupeur avant que des faux pendus viennent se mettre en travers du chemin du wagon, sortant par des fentes sur les côtés. Tu te caches contre Maxime, blottie contre elle, fermant les yeux. Vous vous les prenez dans la tronche, ils sont tout légers, sûrement des mannequins en coton. Tu te redresses un peu, l'air de rien, avant de taper dedans, les poussant vers Max.
« C'EST MAXIME QUI A CRIÉ ! » Tu triches un peu, tu te fais convaincante. En même temps c'est injuste, ils jouent avec tes points faibles les fantômes de ce train. « allez max, arrête de mytho, j'suis sûre que Dylan a reconnu ta voix. »