Jules. Jules. Jules. Son prénom résonne dans ta tête, comme un écho, comme une prière. Tu veux qu'elle soit à tes côtés, là, maintenant, et qu'elle y reste. Tu veux qu'elle soit dans tes bras, et que vous soyez bien, ensemble. Parce que c'est ce que tu as toujours voulu, au fond, même si l'autre moitié de ton coeur n'est pas d'accord. Tu as cette certitude, ce petit quelque chose qui fait que tu sais. C'est ce petit bond dans ta poitrine lorsque tu l'aperçois, c'est le sourire qui apparaît au même moment. Tu veux que rien ne s'arrête, surtout pas. Mais tu ne sais pas ce qu'il se passe, dans son coeur à elle, dans sa tête à elle. Et tu donnerais tout pour n'avoir ne serait-ce qu'un aperçu de tout cela. Tes sentiments se mélangent lorsque son visage apparaît dans ton esprit, tes yeux se ferment. Doucement. Le retour à la réalité est beaucoup trop brusque. La musique te transperce les tympans, bien qu'étant à l'étage en dessous. La soirée commence, les invités doivent tous arriver, et toi, tu réfléchis. Beaucoup trop d'ailleurs. Ce soir, tu as décidé de rester sobre, histoire d'avoir les idées claires pour lui parler. Tu n'as rien fumé de l'après-midi, tes mains tremblent légèrement, ton teint est pâle. Comme si tes habitudes avaient changé, le temps d'une journée seulement. Tu te redresses à contre-coeur, n'ayant aucune envie de descendre accueillir la foule. Mais l'ultime effort enfin réalisé, ton regard parcourt la pièce avec inquiétude, partagé entre la peur et l'envie de la voir. C'est ce petit bond au creux de ta poitrine qui te persuade d'y aller, et tes pas ne tardent par à te mener vers elle. " Jules ? Je dois te parler. "   Ta voix tremble tout autant que tes mains, tu ne te reconnais pas. Tu n'es pas comme ça, tu n'es pas du genre à stresser pour tout et n'importe quoi. Il faut croire, que ça n'est pas n'importe quoi. Tu n'attends pas sa réponse, et grimpe les escaliers lentement, espérant qu'elle soit en train de te suivre. Tu n'as rien prévu, tu ne sais pas quoi lui dire. Avec un peu de chance, les mots viendront seuls. Tu t'assois sur un des lits, silencieux pendant quelques secondes qui te paraissent une éternité. Une grande inspiration. C'est parti. " Je.. Je sais pas ce que tu penses de moi, ou de tout ce qui nous arrive. Mais moi je tiens à toi, et, j'veux pas te perdre. Alors je suis désolé pour ce qui s'est passé chez moi la dernière fois. Et ce qui s'est passé au club. Et tout le reste. J'veux qu'on reparte sur de bonnes bases. Mais je te force à rien, alors, voilà. " Des mots sortis du coeur. Elle avait le droit de refuser, de se barrer sans rien dire, et ne plus jamais vouloir te revoir. Elle pouvait te briser le coeur, bien que, d'ordinaire, c'est à toi que revient cette tache. Tout dépend d'elle, à présent. Et tu te sens plus vulnérable que jamais, t'as l'impression d'avoir tout gâché, tout foutu en l'air. Ton coeur bat fort, il n'attend qu'une réponse, qu'un signe qui le ferait se sentir un peu mieux. Il est au plus mal depuis quelques jours. Et il se meurt lentement. Jules, fais ce qui te semble le mieux. Mais ne l'enterre pas, s'il te plait.

Short, collant, jeffrey campbell. C'est comme ça que t'arrives à la soirée. Tu fais tomber les quelques flocons de neiges tombés dans tes cheveux. Tu dévisages la foule. T'es pas à la recherche de quelqu'un ou de quelque chose. Mais Lui, tu sais que tu vas le croiser pourtant, tu cherches juste à provoquer le destin. Tu danses, verre à la main, à peine entamé. Tu fais pas attention à qui te tournes autour. Fille ou mec. Plus rien n'a d'importance pour ce soir. T'as posé ton cerveau et ton cœur sur off. Jusqu'à ce que le tatoué arrive et qu'il t'oblige à les remettre sur on. T'hésites, t'as pas envie de te prendre la tête. Mais vu que ton cœur s'est remis en marche, il t'oblige à donner ton verre au mec qui dansait avec toi et à suivre Louis. Tu t'arrêtes sur le seuil de la chambre? L'escalier bien en vu. T'as toujours le loisir de t'échapper. Tu te fais mentalement le trajet jusqu'à la porte pour pas te tromper. Les bras croisés, tu laisses ton épaule se loger contre le mur, attendant plus ou moins patiemment ce qu'il avait à dire. « Tu veux qu'on reparte sur de bonnes bases ? T'aurais du y penser avant de me plaquer contre le mur des chiottes, de me briser les poignets et de me faire croire que la meilleure solution c'était que je pose pour toi. Tu vois, tu veux que je change, t'accepte pas ce que je fais, ni mes décisions. T'acceptes pas ce que je suis réellement. Sauf que je veux pas avoir à changer pour plaire à quelqu'un. » Tu t'emportes, tu l'engueules, tu défoules sur lui, comme tu l'aurais fait sur la première personne qui t'aurais adresser la parole de la soirée. Tu les sens encore ses doigts qui te serrent les poignets, ses paroles qui t’agressent, qui te font sentir minable. Un simple objet que tout le monde est capable de briser et de rabaisser. T'en as pris l'habitude, t'as appris à vivre avec, comme t'as appris à ne plus sourire, a paraître aussi froide que la glace. Et puis t'as les flash back qui arrivent et qui te brouillent les yeux. Les soirées passées la tête posée sur ses genoux, aucunes arrières pensées, aucuns sentiments déplacés. Toute ta volonté s'évapore en un soupire. C'est pas toi ça, le regard noir, la voix froide, rester en colère pour de mauvaises raisons. Tu baisses les yeux, trop faible pour croiser son regard. « Et le pire dans tous ça, c'est que je te déteste, parce que j'arrive pas à te détester. »

Ses mots te blessent, ils s'immiscent un à un au plus profond de ton âme. Tu ne t'es jamais senti aussi mal, aussi coupable de n'avoir, au fond, rien fait. Tu ne veux que son bonheur. Avec ou sans toi. Tu ne veux que l'aider, peu importe ce qu'il t'en coûtera. Mais encore faut-il qu'elle le comprenne, ce qui est loin d'être gagné. Elle reste là, appuyée contre l'encadrement de la porte. Prête à partir. Peut-être qu'elle se fout littéralement de ce que tu as à lui dire. Ce qui est sûr, c'est qu'elle ne sait pas que tu y as pensé toute la journée. A elle, à cette discussion, aux issues possibles. Ton cœur s'alourdit, ta peine s'agrandit. Mais elle ne doit pas le voir, surtout pas. Tu serres les poings, de plus en plus fort. Mais qu'est-ce que t'as ? Rien ne va plus. T'es perdu, définitivement. " J'ai jamais voulu te changer, en quoi que ce soit. Je voulais juste que tu sois heureuse, mais si c'est comme ça que tu l'es, alors ça me va. " Ta voix se brise. Tu as du mal à te mettre à sa place, là, au milieu d'un club blindé de vieux pervers. Tu comprends pas. Mais c'est son choix, c'est sa vie, et tu peux rien y faire. T'en prends plein la gueule. Elle est à deux doigts de t'insulter, t'es à presque rien de craquer. Te barrer de cette soirée, partir loin et ne jamais revenir. Mais tu restes là, assis sur ce lit, les poings serrés et le regard perdu. Putain, mais qu'est-ce que t'as foutu ? T'as merdé, et ça te retombe dessus, comme d'habitude. Dans un murmure, tu libères tes pensées les plus profondes. " Je te l'ai dit. Je tiens à toi. Et ça me fait rien de le dire, j'veux que tu le saches. J'veux que tu saches que, t'es beaucoup plus importante pour moi que ce que tu le crois. " Tu baisses les yeux. T'as pas honte de tes sentiments, tu ne veux rien lui cacher. Et même si sa dernière phrase te réchauffe quelque peu le cœur, tu ne peux pas t'empêcher d'avoir mal. Personne ne peut te blesser. Tu dis ça simplement parce que ça t'es jamais arrivé. Mais il faut croire qu'il y a une première fois à tout. Tu te lèves, et t'avance vers elle, t'efforçant de garder tes distances. Tu veux surtout pas lui faire peur, même si c'est peut-être déjà trop tard. Tu peux pas la perdre, pas maintenant. Parce que tu t'en remettrais pas.

Tes paupières papillonnent, tu ne le vois plus qu'entre des flashs de noir. Tu passes une main tremblante entre tes mèches emmêlées. L'envie de fumer te reprend. Si tu pouvais claquer celui qui a décidé que les relations seront foireuses ou complexes, tu le ferais avec grand plaisir. Ses mots atteignent ton coeur, pas ton cerveau. L'éternel conflit entre ces deux-là. Un jour tu finiras pas les balancer tous les deux. T'entends sa voix se briser, des vagues qui vont s'écraser contre un rocher. Ça serait plus simple de le détester, de le planter. Clair et précis. C'est exactement ce qu'il faudrait. Ça lui ferais mal. Ça t'en ferais à toi aussi. Vos deux âmes n'ont pas à souffrir si t'es capable de les panser. Tu pourras toujours essayer en tout cas. Tu restes silencieuse. Il n'y a rien qui arrive à sortir de ta bouche, mots, phrase, insultes, déclaration d'amour. T'es assailli par différent plan qui apparaisse dans ta tête ; le claquer, s'enfuir, coup de genoux dans ses parties. Mais finalement y en a qu'une seule qui est la bonne. Tu franchis avec hésitation le pas qui vous sépare, mais t'arrives pas à te laisser aller contre lui, à passer tes bras autour de lui, à enfouir ton visage dans son cou. Parce que t'as peur qu'il te repousse, même si il l'aurait déjà fait. T'es tellement près de lui qu tu pourrais entre son cœur battre, vos peaux se frôlent sans se coller. T'as envie de te fondre en lui, t'as déjà une partie de lui graver en toi, mais c'est pas suffisant. T'as envie d'effacer tout ce qui c'est passé avant cette seconde. Cette seconde de bonheur pure.  T'as perdu la force de sourire en même temps que ton talent pour t'exprimer. Tu lui souffles presque dans le cou les aveux les plus dur à faire pour toi, bougeant tes lèvres en un murmure inaudible si tu ne te trouvais pas aussi près de lui. Les sentiments et toi, vous n'avez jamais réussi à vous entendre. Je ne veux pas te perdre. Je refuse de te voir disparaître de ma vie.

Tu la vois hésiter, devant toi. La distance entre vos deux corps s'est considérablement réduite, mais tu n'arrives pas encore à te rassurer. Le silence règne dans la pièce, même si la musique de l'étage du dessous le déteint légèrement. Il est beau, ce silence. Il n'est pas parfait, et c'est ce qui fait tout son charme. Tu entends la respiration de Jules, chaque inspiration, bien distincte de chaque expiration. Elle est là, à quelques centimètres de ton visage. Et elle est belle, elle est magnifique. Et tu contemples chacun de ses traits, sans pouvoir te détacher d'elle. Elle t'hypnotise. Mais elle ne s'en rend sûrement pas compte. Tu ne veux pas sourire, tu n'y arrives pas. Tu as trop peur de ce qu'elle va faire et de ce qu'elle est capable de faire. Ton regard se plonge dans le sien, tu ne bouges plus. Comme figé. Tu ne respires plus, tes mains tremblent un peu, mais c'est déjà trop. Tu as cette impression d'avoir treize ans, et de te retrouver face à une fille pour la première fois de ta vie. Ses lèvres s'entrouvrent. Et là, tu t'attends au pire. Ton cœur bat la chamade, il est prêt à exploser. Surchargé. Mais ces mots-là, tu ne t'y attendais pas. Ils font fondre la petite couche de glace qui t'avait alors enveloppé, et tu commences à te sentir presque bien. Mais tu ne bouges pas, encore par peur. De l'effrayer, sûrement. Pour la première fois, tu ne te sens pas si sûr de toi, tu ne sais pas ce que tu vas dire ou faire. Tu es perdu. Et tu sais très bien que c'est elle, la responsable de tous ces bouleversements intérieurs. Son souffle dans ton cou manque de te faire défaillir, te rendant ultrasensible. C'est donc ça, l'amour ? Le vrai ? Certainement. Tu trembles, mais ta main droite s'avance doucement vers la sienne. Tu refuses de la toucher, même si tu en crèves d'envie. Tu te dis alors que le moindre faux-pas, la moindre maladresse pourrait t'être fatale. En plus, ces putains de papillons sont en train de faire une bataille sanglante au creux de ton ventre. Bien sûr, que t'as déjà ressenti ça. Mais jamais aussi fort, jamais ils ne sont remontés dans ton cœur de cette façon. Tu te sens bien et mal à la fois. C'est indescriptible. Et ça aussi, c'est beau.  

Ça te perturbe cette proximité. Etre aussi près de lui sans le toucher. Tu te devrais te sortir de cette torture. La simplicité, c'est partir. Mais là t'es pas courageuse, loin de là, juste incapable de le laisser plan, de vous faire du mal à tous les deux. Parce que ouai, il est là le problème, t'arrives plus à être indifférente avec lui. Un problème ? Mais il y a pas de problème putain, -enfin si, deux même, mais on verra plus tard -assume un peu. Assume ce que tu ressens au lieu de rester aussi froide que la neige qui tombe derrière la fenêtre. Tu peux plus, te contrôler. Il y a une voix dans ta tête qui te gueule d'arrêter ces conneries. T'as peur ? La vie fait flipper si t'avais pas remarquer. Tu peux crever en traversant une rue. La vie est faite pour prendre des risques. Assume c'est tout ce qui te reste à faire. T'entends son souffle se couper, t'as envie de claquer des doigts pour le réanimer. Mais ton geste serait trop déplacer. Il y a un mouvement qui brise votre immobilité sur ta gauche. Sa main qui essaye d'attraper la tienne. Qui veut plus se sentir seule, comme la tienne apparemment. Parce qu'elle finit par la rejoindre. C'est pas suffisant pourtant, tes doigts se détachent des siens, et tes bras prennent à l'assaut son cou, tes yeux se ferment alors que ta tête heurte avec douceur son épaule. Ta peau entre ton contact avec ses tatouages, et t'as presque envie qu'ils déteignent sur toi. Tu tends l'oreille, cette fois c'est réel, t'entends son cœur battre. Et puis il y a cette bulle qui crève dans ton cœur, et qui le remplit d'autre chose que de sang. T'es aveugle, tellement que tu ne vois pas que c'est lui qui te fait sentir en feu. Qui te fait sentir vivante. Enfin.