FÊTE FORAINE ✤ mme irma

J'ai besoin d'argent, mon patron veut absolument pas me filer d'avance et y'a une fête foraine qui débarque en ville en cherchant un peu de main d’œuvre. Alors moi, qu'est-ce que je fais ? Je cours réserver une place pour une attraction qui pourrait me rapporter quelques pièces. Me voilà donc déguiser en Madame Irma. J'ai vraiment la dégaine de la voyante gitane dans mes vêtements mais je trouve ça drôle : un châle autour de mes épaules, une tonne de bijoux couleur or mais en plastique, un foulard sur la moitié de la tête et un maquillage un peu trop prononcé. Andy a accepté de me prêter sa caravane et j'ai pu y installer mon matos acheté en promo au supermarché du coin, dont une boule en cristal à -70%, une affaire. Devant l'entrée, je précise que les séances se font par trois, et que le prix est de cinq livres sterling par personne puis j'attends tranquillement, autour d'une table en bois que les clients débarquent. Amour, amitié, travail, venez découvrir votre avenir.

Je crois que je n'aurais pas pu rêver mieux. Une fête foraine. Wouaaaah... Un lieu fait pour une nana dans mon genre. Bien déjanté, bien gamin, bien frais, pas de prise de tête, juste de la folie et des couleurs partout ! Dès l'ouverture de cette fête foraine, j'ai balancé un sms à BJette pour la supplier de m'accompagner. En bonne pote qui supporte mes caprices de gosse, elle a bien voulu venir avec moi. Et là, on y est. On entre. On m'offre dès l'entrée un petit minion en peluche, que je serre tout de suite très fort contre moi. J'vais l'baptiser Monsieur Louche - parce qu'il a un défaut de fabrication qui fait que son oeil droit part en couille. Impatiente et surexcitée, je tire Billie par la manche en montrant toute sorte d'attraction du bout du doigt, l'air émerveillé. "Oh viens on va faire ça ! OH NON ! Ça ça a l'air mieux !" Et au final, après une ou deux minutes d'errance et d'indécision, mon regard s'arrête sur une caravane. Un panneau avec marqué "Mme Irma, voyante. 5£ par personne". Ooooooh... Je reste plantée là un instant avant de traîner BJ à ma suite vers l'entrée de cette caravane assez glauque et décorée comme celles des gitans. Une fois à l'intérieur, tout est assez sombre. Les fenêtres son fermées. Des biblos sont entreposés un peu partout et en face, une table, avec une boule de cristal qui doit sûrement valoir une fortune. Assise derrière cette table, une forme, cachée sous un châle. "Bonjour..." J'ose murmurer, impressionnée par l'atmosphère divinatoire de ce lieu.

La fête foraine, pour toi, c'est la bande de potes, le petit couple qui va rompre juste avant les montagnes russes (dangereux, un accident est si vite arrivé), le premier baiser dans le tunnel de l'amour, mais aussi les drogués défoncés qui squattent les zones d'ombres. C'est la deuxième fois que tu viens, la dernière fois c'étais de nuit. On t'as donné un panda en peluche à l'entrée, tu le regardes et tu le donnes à un gosse qui te regardes avec envie. Tu reprends tranquillement ton chemin, t'es pas pressé, t'as rien à faire de la journée. Tu finis par tomber sur un truc qui te plait. Mme Irma. T'entres et puis là, je crois que tu pourrais pas être plus surpris. Chuck ?! Ton sourire en coin s'affiche sur ton visage, tu tournes la tête. Et tu vois ta distribueuse d'amour. Tu lui souris à elle aussi,a avant de t'asseoir à coté d'elle. Attendant qu'une troisième personne se joigne à vous.

La caravane est vide, tout comme mon bocal à pièces. D'un côté, c'est compréhensible. Qui a envie de se faire pigeonner par une femme qui prétend voir des choses dans une boule en cristal ? En attendant mes potentiels clients, je lis en vitesse l'article du barman de ce mois. Des rumeurs, des foutages de merde, des mensonges, quelques vérités, des dossiers. Un grand classique. Je relis soudainement le journal pour le ranger lorsque j'entends du monde devant la caravane. Trois clients, d'un coup. C'est le début de la richesse. En vitesse, j'arrange le châle déposé sur mes épaules afin de les accueillir, refermant ensuite derrière eux pour mieux être plonger dans cette drôle d'ambiance. « Bonjour, installez-vous ici, près de moi. » Je retourne m'assoir sur mon fauteuil, me donnant un drôle d'air mystérieux, rentrant dans la peau de mon personnage tout en indiquant les trois chaises en bois situés en face de moi, en face de la grosse boule de cristal. Je souris discrètement à Cèzanne après avoir secouer la tête. « Non, appelez moi Madame Irma. » Pas de Chuck pour le moment. Puis je commence. J'essaye à peu près de reproduire les mêmes gestes que dans les films, j'agite mes mains autour de la boule, en fermant les yeux et en faisant des bruits de méditation. « Je vois.. » Qu'est-ce que je vois ? Absolument rien. J'ai les yeux fermés en même temps. Bref, je vais inventer des mythos, y'a plus le choix. J'ouvre un oeil, super concentrée comme si ça allait soudainement marcher et je me dis que la souffrance reste un sentiment que tout le monde a connu. « Du mal. Oui, de la souffrance. Quelqu'un a fait du mal à un proche, ici, à quelqu'un qui lui était cher. » Inconsciemment ou pas, c'est déjà arriver à tout le monde. Impossible de me tromper. « Je vois aussi beaucoup d'amitié. De l'amour. De puissants sentiments... » Je marque une pause, parce que c'est facile de deviner que les deux demoiselles sont copines. Par contre, je ne connais pas grand chose de Cèzanne, il est trop accessible ce mec, impossible de savoir s'il a réellement un bon fond. « Vous ! » Je relève les yeux pour pointer la brune, celle qui est le plus concentré et qui semble croire toutes les conneries que je déballe. « Donnez-moi votre main, vite. » Je me jette presque sur la table, m'affalant dessus pour lui attraper la main, comme si j'étais vraiment d'avoir une vision ou une connerie du genre puis je me concentre sur les traits de sa main. « Vous êtes quelqu'un de bien. Mais.. je vois quelqu'un de mal. Vous allez probablement croiser son chemin. Faites très attention à vous, mademoiselle. » J’affirme tout ça en reculant pour me rassoir sur mon fauteuil en velours, hochant la tête d'un air très sérieux.

Cèzanne, mon copain le facteur d'amour, vient de s'asseoir à côté de moi. En guise de bonjour, je lui fais un petit clin d'oeil complice tandis que Billie s'assoit elle aussi sur une chaise, tous face à la voyante de l'autre côté de la table. Et lorsque la dame sous le châle entre enfin dans son espèce de transe, je me fige. Les yeux rivés sur elle. J'inspire longuement sans pouvoir relâcher d'air. On la voit qui agite ses mains au dessus de la boule de cristal, de ces gestes dont seuls les voyants connaissent les secrets... Que ressent-elle ? J'aimerais tellement vivre tout ce qu'elle vit là, maintenant. Juste une fois. Alors je ne la lâche pas des yeux, le regard empli d'une grande admiration. Elle voit... Mais dis-nous ! Je vais pas tenir longtemps. Et là, elle nous sort qu'elle voit de la souffrance... Oh... Ah bah moi je souffre pas plus que ça, là, tout de suite. Je tourne la tête vers Billie, perplexe, puis vers Cèzanne. Mes petits bouts de choux... Pas eux. J'ai un élan de tendresse, mais il est aussi coupé net par la suite. Elle voit de l'amour et de l'amitié. Ah bah ça oui, oh que oui ! J'ai un second élan de tendresse envers ma BJette préférée mais alors que je m'apprête à lui pincer affectivement le bras, la voyante s'écrie : "Vous !" Elle me pointe du doigt. Je sursaute, m'enfonce dans ma chaise et jette un coup d'oeil derrière moi pour vérifier si c'est bien à moi qu'elle s'adresse. Personne derrière. C'est à moi qu'elle parle... She's talkin' to me.. "Moi ?..." Je couïne en plaquant ma main sur ma poitrine, comme si j'étais coupable de quelque chose. Soudain, la voyante se jette sur la table et m'attrape la main, alors que je manque de tomber à la renverse. Elle l'étale sur la table et se met à regarder attentivement ma paume. Quand je comprends ce qu'elle fait, je me calme et observe la scène, impressionnée, la bouche grande ouverte. Et quand la voyante se rassoit au fond de son siège... Elle affirme que je vais croiser la route de quelqu'un de mal... Je perds mon large sourire et déglutis péniblement, avant de jeter un petit regard vers Billie et Cèzanne, qui ont assisté à tout ça. Mais pfff.... Personne peut me faire du mal à moi... Pas vrai ? Je vais quand même poser quelques questions à la voyante, après... Sait-on jamais.

Tu prends place à coté de Rose et une blonde. Tu la connais, mais impossible de la remettre. En tournant la tête, tu te rends compte que c'est Chuck, qui se la joue Mme Irma. Tu lui rends son sourire et tu te cales bien contre le dossier de te chaise, prêt à profiter du spectacle. Tu suis le mouvement des mains de chuck, alias madame irma. Elle t’impressionne la petite, elle joue le rôle à la perfection. Du mal. Oui, de la souffrance. Quelqu'un a fait du mal à un proche, ici, à quelqu'un qui lui était cher. Tu baisses légèrement la tête, te sentant concerné par cette phrase. L'image de Cléore apparaît et tu secoues la tête pour la chasser. Je vois aussi beaucoup d'amitié. De l'amour. De puissants sentiments... Mais elle lit dans nos pensées ou quoi ? Tu te penche en avant, désireux d'en savoir plus. Vous ! Tu sursautes, t'as bondit vingts centimètres au dessus de ta chaise. Irma pointe du doigts Rose, elle s'affale sur la table, tu comprends pas ce qui se passe jusqu’à ce qu'Irma regarde les lignes de sa main. Tu reportes ton attention sur Rose, qui semble légèrement bouleversé. T'as envie de lui dire que c'est que des conneries tout ça, mais tu sais plus quoi penser. T'essayes de te remettre les idées en place et tu tournes vers Irma. tu te figes quelques secondes, faut avouer qu'elle est canon comme ça. Tu vois quoi d'autres ? Amour ? Amitié ? Argent ? Elle a réussi à attirer ta curiosité.

Affalée sur ta chaise avec un air dubitatif, tu observais silencieusement la scène qui se déroulait devant toi, soit ; "la voyante" qui faisait son show. Pseudo concentration intense, geste exagérés et prédictions lancées à la volée, vous aviez le droit à la totale dans le genre caricatural, et le pire, c’est que Rosie était à fond. Elle semblait boire littéralement les paroles de la voyante et avait même l’air de flipper. T’aurais voulu interrompre tout ça et la rassurer, mais faire ça, c’était un peu comme dire à un gamin que le père noël n’existait pas. T’avais pas envie de gâcher la magie du truc, surtout que Rosie ne semblait plus être la seule à croire à ces conneries. En effet, le mec que tu n’arrivais pas à replacer (bordel, ça te perturbait) semblait quant à lui à moitié convaincu, posant même une question. Mains dans les poches, tu ne peux alors pas t’empêcher de lever les yeux au ciel et commence, d’un air distrait, à t’attarder sur des éléments de déco tout en attendant la réponse de la voyante.