maybe it was meant to happen (morgandoherty)

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je t'ai vue et mon cœur s'est arrêté

But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.

Bientôt onze heures et toujours cette sensation que je me suis trompé de porte. Bientôt une semaine et toujours cette impression de ne pas être à ma place. Bientôt des mois, et toujours pas acclimaté à ce nouveau bureau. Il est mien, mais j'ai plutôt l’impression de l’avoir emprunté. Je m’enfonce dans mon siège et observe les murs nus. Je baisse les yeux pour inspecter le sol. Il est impeccable, sans une trace. Je devrais sérieusement songer à personnaliser cet endroit. Il est froid et peu accueillant. Un peu comme moi. J’ai du mal à l’avouer, bien que cela soit vrai. Mais avec les clients je suis différent, et j’ai grand intérêt à l’être d’ailleurs. Je débute, je tâtonne, j’expérimente, je me rate et je recommence. Mais avec les possibles acheteurs, je suis avenant et chaleureux. Il faut que ce bureau – que mon bureau – inspire ça, aussi. L’étiquette est importante. Elle est la première impression, mon père n'a de cesse de le répéter. Alors je décide d’aller au centre-commercial, ce midi-même, pour commencer à agencer à ma guise mon espace de travail.

Je prends entre mes doigts la pile de dossiers grandissante située à droite de mon bureau pour y mettre de l’ordre. Pas encore de vente. Bien entendu. C’est trop tôt. Mais les clients potentiels affluent. De plus en plus. Ce n’est pas pour me déplaire. Surtout que Bill, mon père, m’a prévenu que l’agence immobilière du coin, dans laquelle il m’a envoyé suite au départ à la retraite de l’ancien agent, avait peu de succès. Mais je pense pouvoir rajeunir quelque peu l’enseigne, ici, à Bristol. Cette ville a du potentiel. J’entends l’église sonner douze heures. Je vérifie sur ma montre, par habitude, puis me lève pour enfiler ma veste. Ma voiture m’attend sur le parking. Direction le shopping center.

A peine entré, j’y suis déjà perdu. C'est parfois dans les lieux les plus étendus que l'on se sent le plus à l'étroit. Je n’y ai jamais mis les pieds avant, m’étant consacré au travail et à mon déménagement. En effet, entre les dossiers de mon prédécesseur à rattraper et les cartons à vider, j’ai eu du mal à me distraire. Je décide de manger sur place lorsque je vois un café sympa. Je jette un coup d’œil au dessus de ma tête et aperçois une grande enseigne de décoration. Je monte immédiatement dans l’ascenseur, vide. Je n’aime pas beaucoup ces engins mais les escaliers se trouvent à l’opposé et je n'ai que peu de temps. Les portes commencent à se fermer lorsque j’aperçois une fine silhouette se précipiter dessus. J’hésite, puis appuie finalement sur le bouton destiné à l’ouverture des portes. Elle me souffle quelques remerciements et s'appuie contre la vitre. « Ce n’est rien. » Je réplique, distrait. L’ascenseur commence alors son ascension.

Puis je l'ai vue et mon cœur s'est arrêté. Une demi-seconde. « Anouk » je souffle, surpris.

crackle bones

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maybe it was mean happen

le soleil est à son apogée et colore le ciel de ses rayons, dans des tons d'un orange blafard. mon regard ensommeillé se jette sur le réveil. quatre heures. un soupir s'échappe de mes lèvres gercées, tandis que je me recroqueville sur moi-même, dans ce lit trop grand pour mon petit corps frêle. je papillonne, les yeux encore habitués à l'obscurité rassurante de mon sommeil. et puis, je retombe dans les bras de morphée.
dix-heures. je me réveille à nouveau. le soleil est maintenant plus haut et le ciel est bleu. je m'étire, m'enroulant dans les couvertures, tel une enfant de quatre ans. en silence, je sors de mon lit, pour effacer les traces de mascara et de rouge à lèvres de la nuit dernière. rosie criserait si elle voyait ça. et à l'idée de voir la jolie, la bouche en force de o, je souris.
vite, le noir autour de mes yeux disparaît pour laisser place à des cernes. je ne dis rien, constatant le violet. et, rageusement, je l'efface à coup de poudre, avant de recommencer une nouvelle journée à bristol.
toute la matinée, je range et trie affaires sur affaires. simplement habillée d'une salopette et les cheveux relevés, je déplace et replace, le blues matinal sur mes lèvres nues. je chantonne ce qui passe à la radio, ayant presque fini de trier. c'est lorsque j'ai tout terminé que je souffle enfin. ça y est.
pour fêter ça, je me permets une bière, une seule. je m'avance vers le frigo, sans regarder le post-it rose fluo. et, lorsque j'ouvre la caverne d'ali baba, il n'y a plus rien. je fais une moue, avant de détacher le post-it. salut nouk ! y'a plus de bières, et y'en a en promo au shopping center. xxx je lève les yeux au ciel. génial.
je prends clope et clés, enfile mes chaussures avant de monter sur mon fidèle destrier, mon vélo bariolé. et je file, à toute bezingue sur les routes de bristol, jusqu'au shopping center, à la recherche de cette boisson rafraîchissante appelée bière. une fois entrée dans le grand magasin, je suis un peu perdue. je regarde de tout les côtés, comme un animal apeuré, un peu inquiet. je suis noyée dans cette masse de gens. alors comme pour éviter la foule, je fronce les sourcils, et, d'instinct, alors que les portes d'un ascenseur se ferme, je me jette dedans. heureusement, l'homme qui se trouvait dedans retient les portes, le temps que je me faufile. à bout de souffle, je lui adresse la parole. merci. ce n’est rien. j'appuie sur le bouton et l'engin commence sa terrible ascension vers le sommet du bâtiment.

anouk. je m'affole. c'est le garçon. je croise son regard, et je le reconnais. c'est morgan. génial. un sourire gêné se dessine sur mon visage, avant que je ne me mette à mentir. hm, excusez moi... vous avez du vous tromper.

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je t'ai vue et mon cœur s'est arrêté

But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.

Je regarde devant moi. Sans une parole de plus. Je n’ai pas perdu mes moyens non – cela m’arrive peu, à vrai dire – mais j’ai en quelque sorte été pris au dépourvu. Comment s’attendre à la trouver en ce lieu, à la voir y entrer, alors même que j’y suis ? Jamais je n’ai rencontré un ancien camarade, par hasard, et encore moins ici à Bristol, où les chances sont divisées par quatre cent mille, peut-être. Or je suis là avec elle. L’ascenseur est exigu, et ses parois de verre me revoient cette image étonnante de la jeune fille et du jeune garçon que je suis. Je tente de raviver ma mémoire avec peine. Je ne me souviens même pas lui avoir adressé la parole, alors comment expliquer cette reconnaissance instantanée ? Je n’ai pas hésité un instant avant de murmurer son nom, bien que je sois le genre de personne à méditer ses paroles avant même d’ouvrir la bouche. Soudain, une réminiscence.

Elle me parvient tel un éclair. J’étais devant mon casier. Seul. Rare occasion, à l’époque. Et j’attendais. Quoi, je ne saurais le dire. Une élève dont la crinière parfaite m’évoquait le soleil, marchait à petits pas rapides à l’autre bout du couloir désert. Je remarquai une petite mèche s’échappant de sa chevelure. Elle leva la tête, à ma vue mais ne s’arrêtait pas. Je décelai un sourire sur ses lèvres. Petit, fermé. Mais un sourire comme je n’en avais jamais vu. Lumineux, comme sa chevelure. Comme le soleil, oui. Doux, aussi, mais si lumineux qu’il m’empêchait de voir clairement qui se cachait derrière. Je ne le lui avais pas rendu, peut-être trop désarmé par cette expression énigmatique. Elle s’éclipsait dans la salle, à l’angle. Et alors cet instant, ce sourire, je l’oubliai aussi vite qu’il m’était parvenu. Et j’en omettais également l’auteure, comme si rien ne s’était passé. Et la vie reprenait son cours. Comment se fait-il qu’aujourd’hui, ce rappel me vient clairement ? Cette fille me fait me poser de nombreuses questions. Je n’apprécie pas tellement ça.

« Hm, excusez moi... vous avez du vous tromper. » Je fronce les sourcils instantanément. Les portes s’ouvrent. Elle sort. Mais je n’admets pas m’être trompé. C’est impossible. Je l’attrape par le poignet, trop fort peut-être. J’ai peur de lui avoir fait mal. Elle m’a l’air fragile. Pas comme avant, pourtant. Son regard n’est pas doux. Il est farouche. Je la lâche. Mais elle reste là, finalement. « Doherty, c’est toi. » J’ai l’impression de me répéter. Mais je veux juste qu’elle confirme mes dires. Je la regarde dans les yeux, mais elle ne les lève pas. Je veux affronter son regard sauvage, juste pour être sûr d’y voir cette douceur caractéristique de la jeune fille que j’ai connue. « Qu’est-ce que tu fais à Bristol ? » Je demande d’une voix tendre, comme pour m’excuser de l’avoir brusquée. Je n’ose pas lui demander ce qu’elle fait dans ces vêtements étranges, avec cette mine fatiguée et ce regard différent. Elle hésite, ouvre la bouche, puis la referme. Je ne veux pas insister. Ce serait lui montrer un trop grand intérêt. Mais la curiosité, et un je ne sais quoi - ce hasard, qui s'impose à moi comme un signe ? - font que je désire ardemment tout savoir. « Suis-moi » Je lui dis. C’est quitte ou double. Elle peut s’enfuir si elle le souhaite. Mais elle a l’occasion de venir avec moi. Nous pourrions nous poser. Parler. Dans le café que j’ai vu au rez-de-chaussée peut-être ? Où bon lui semble. Pourtant j’ai peur de sa réaction. Elle paraît imprévisible. Incontrôlable. Inatteignable.

crackle bones

Spoiler:

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maybe it was mean happen
tête baissée, je fonce dans l’ascenseur, échappant à la foule qui compresse mon cœur. mais comme si le destin d'humeur joueur depuis ce matin, se décidait à jeter à nouveau les dés, je me retrouve coincée en compagnie de morgan dans la cage de verre. je ne m'en rends pas compte, bien trop soulagée de m'être enfuie de cette marée humaine, jusqu'à ce que sa voix m'appelle, de ce nom que j'ai tant de fois voulu oublier, éradiquer, effacer. doherty. je lève la tête, à moitié sonnée.
doherty.
doherty. ça me ramène subitement à ces années à londres, à cet ennui, à cette vie, pas pour moi, pas pour celle que je suis devenue. ça me rappelle ces couloirs blancs, ces vêtements trop serrés, ça me rappelle le silence, foudroyant, et les regards, les galaxies sur mes genoux, et les tâches sur mes robes. toutes ces années gâchées, toutes ces années à rêver d'une liberté que j'ai enfin, au dépit d'un passé de princesse. princesse est devenue rebelle, princesse a retiré ses robes pour enfiler des salopettes.
princesse boit de la bière et fume du shit. princesse n'a jamais été une vraie princesse. du moins, pas celle du royaume qu'on lui attribuait. et comme princesse ne veut pas revenir à cet enfer, je mens. un sourire gêné, tremblant sur mes lèvres gercées, abîmées, je lui mens ouvertement, sur mon identité. comme à rose, eddie, comme à jules et tout ces gens.
je leurs mens.
les portes s'ouvrent enfin, et je sors, le pas d'un air faussement assuré, alors que mes mains tremblent. allez, encore quelques pas avant qu'il ne disparaisse. un, deux et une main attrape mon poignet, assez fermement pour m'empêcher de m'enfuir. vivace et sauvage, je me retourne, le regard cette fois moins doux, farouche. il croise ses yeux, bleus, et comme par instinct, les miens se baissent, habitude d'une sayann bien trop polie. j'ai envie de lui hurler de me laisser tranquille, de repartir, loin. de me laisser en paix.
mais je ne dis rien, les lèvres pincées, à l'arrêt. doherty, c’est toi. non.
aucun son ne sort de ma bouche. je garde les yeux sur mes docs martens, les contemple, pour éviter ceux de morgan. qu’est-ce que tu fais à bristol ? j'évite les gens comme toi. silence. toujours rien.
suis-moi. cette fois, je lève le regard et plante mes yeux dans les siens. il avance, et je le suis, silencieuse tel une morte. les bras croisées et une mèche de cheveux devant le visage, j'ai l'air fermé et inexpressif.
pourtant, je le suis, encore et encore. il pourrait m'amener loin, très loin, quelque chose me dit de le suivre. puis finalement, à un croisement, je ralentis et lui lâche, comme une bombe. qu'est-ce que tu veux de moi ? ma voix est celle d'un animal sauvage, presque agressive. je ne lui montre aucun signe d'amitié, parce qu'il est de mon passé.
et mon passé est mort, mort et enterré à jamais.

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je t'ai vue et mon cœur s'est arrêté

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Je délie mes épaules pour en défaire les nombreuses tensions. La jeune fille me surprend, m’épate. Je crois m’être trompé, oui. Elle est tellement différente, tellement changée, tellement autre. Je continue d’avancer, sans plus même savoir où je vais, et dans la cacophonie incessante du shopping center, j’arrive à entendre ses pas légers et réguliers me suivre. Je suis déboussolé, et, soudain, énervé. Enervé contre moi-même. Quelle perte de temps et d’énergie, me dis-je. Pourquoi est-ce que je me sens forcé à lui parler, à lui montrer que je suis là et que j’ai vu qu’elle était là, dans ce putain d'ascenseur de hasard. Les mots se bousculent, se battent et s’agressent dans mon esprit alors que mon corps se déplace, le pas sûr, avec charisme. Mon sang se glace. Le bruit des docs sur le sol s’est soudain arrêté, laissant place à ces mots crûment dits : « Qu'est-ce que tu veux de moi ? » Je me retourne lentement, le regard froid, un mince sourire aux lèvres, comme pour cacher cette décontenance qui m’envahi. Là je la vois de face et l’observe intensément mais hâtivement. Cette fille à qui je n’ai jamais adressé la parole, à qui je n’ai jamais prêté attention se tient sous mes yeux, et je réalise alors ce qu’elle était et ce qu’elle est devenu. Et c’est alors que je comprends pourquoi je voulais tant la retenir et lui parler, lorsque je l'ai reconnue. A l’époque je n’avais rien vu d’elle: ses faux sourires et ses robes de soie m’aveuglaient. Là elle emplit l’espace. Son style détonne et sa voix choque. Elle est différente, mais pas que de celle qu'elle fut. J’ai l’impression que nous voguons seuls au milieu de cette marée humaine. La bretelle de sa salopette tombe légèrement sur la droite. Elle sent mon regard et la remonte avec cette hargne qui la caractérise aujourd’hui. Je redécouvre Doherty, la fille qui se cachait derrière une normalité luxueuse qui l’avait étouffée, peut-être ? J’ai envie de tout savoir d’elle, parce qu’elle m’étonne, elle m’émerveille aussi, avec son air de lionne. Je devrais partir et laisser là cette bête sauvage qui ne semble en rien vouloir m’accueillir. Son ton glacé devrait me rebuter, mais je me tiens là, encore.

« Tu ne te demandes pas ce que je fais là ? » Je lâche, feignant la décontraction. « Je ne te veux rien, Doherty, ne crois pas que je m’intéresse à toi. » Je continue, comme pour me venger de son ton déplaisant, les poings serrés dans les poches de mon pantalon. « C’est juste que j’avais envie de parler un peu. Tu es la première personne de Londres que je croise ici, tu sais. » J’essaie de poser ma voix, mais je vois bien que rien ne l'adoucira. Ses yeux continuent de lancer des éclairs, comme pour m’informer que je m’aventure en terrain hostile. Je secoue lentement la tête et observe la foule, quelque peu gêné d’être massacré par le regard de cette fille. Je finis par lui demander, après ce silence : « Que t’est-il arrivé ? » Je ne sais pas bien comment formuler mes pensées et mes sentiments, alors c'est cette question que je balance, cette question coutre avec, sûrement, une réponse des plus longues. Mais, me doutant de sa réaction, je soupire en regardant le bout de mes chaussures. Elles sont chics, bien lustrées. Elles contrastent tellement avec celles d'en face, délacées et poussiéreuses.

crackle bones